Antoine DELCROIX, Professeur des universités,
Université des Antilles, France Outre-Mer
Titre : « L'évaluation au prisme de la contextualisation :
l'exemple du système éducatif français.
Vers une théorie de l’évaluation contextualisée ? »
Mardi 12 avril 2022 (9h40 heure de Guadeloupe)
Résumé :
Dans les pays présentant simultanément des contextes géographiques et sociétaux très variées et un système éducatif très centralisé, la question de l'évaluation se pose de manière particulière dans l’articulation des différents niveaux d’intervention : celui de l’État, souvent le seul prescripteur, celui des divisions territoriales disposant parfois de peu de marges dans l’exécution des décisions nationales, et celui des acteurs de terrain souvent tiraillés entre le respect des dispositions réglementaires et le besoin d’adapter leurs interventions aux caractéristiques contextuelles de leur lieu d’exercice.
Cette question ne peut faire l’économie de réinterroger les finalités assignées au système éducatif par le pouvoir politique et, en particulier, les connaissances, compétences et valeurs qu’il a pour mission de transmettre. Il s’agit donc d’insérer la question de l’évaluation dans une perspective plus globale, proche de l’approche de la transposition que possédait Michel Verret. Cette approche interroge l’ensemble de la chaîne de transposition, en partant de la transposition des savoirs et des valeurs stricto sensu, et en aboutissant aux évaluations que le système met en place. Pour ce dernier point, il est autant question de mesurer les acquisitions des élèves que de vérifier l'accomplissement par les institutions (établissements scolaires, universités…) de leur mission avec toutes les diligences nécessaires. En bref, il s’agit de s’assurer, pour l’État, que le système éducatif – par les transpositions qui s’y opèrent – joue socialement le rôle qui lui est confié.
Nous présenterons deux exemples pris dans le système éducatif français qui constitue un prototype d’organisation très centralisée s’adressant à un pays aux contextes très divers. Ces exemples renvoient aux deux facettes relevées plus haut, l’évaluation des acquisitions par les élèves et étudiants et celle des institutions.
Le premier exemple sera celui des examens permettant l’obtention de diplômes nationaux et des concours de recrutement de professeurs de l’enseignement secondaire. Les acteurs territoriaux sont alors confrontés à la nécessité de préparer au mieux leurs élèves ou étudiants à ces épreuves nationales, tout en assurant une connaissance suffisante des caractéristiques propres au territoire qui sera assez souvent le lieu d’exercice des lauréats.
Le second exemple sera celui de l’évaluation d’une institution d’enseignement supérieur par l’autorité en charge de ce processus. Les démarches d’assurance-qualité conduisent souvent à des processus normalisés et standardisés,souvent conçus de manière relativement rigide, aussi bien par les critères d’évaluation retenus que par l’infrastructure technique (ou technocratique ?) associée. Ainsi, les acteurs locaux peuvent les vivre comme inappropriés, voire injustes, ce qui peut provoquer une défiance à l’égard du processus.
Ces exemples s’inscrivent dans un débat plus général sur l’articulation entre le local et le global, maintenant bien documenté dans le champ de la contextualisation didactique. Notre espoir est de contribuer au questionnement sur la nécessité d’une théorie de l’évaluation contextualisée, qui pourrait trouver ses bases dans les différentes contributions de ce colloque.
Notice biographique :
Antoine Delcroix est professeur à l’université des Antilles, exerçant ses activités d’enseignement à l’INSPÉ de l’académie de la Guadeloupe et de recherche au Centre de recherches et de ressources en éducation et formation (CRREF). Outre l’exercice de responsabilités et missions dans le système universitaire, il a participé à la fondation du CRREF, unité de recherche qu’il a dirigé dix ans. Il est actuellement directeur de la revue Contextes & didactiques.
Après une première partie de carrière scientifique consacrée à la recherche en mathématiques, il s’est tourné vers la recherche en éducation en interrogeant plus particulièrement les relations entre les contextes et les situations d’apprentissages ou d’enseignement. Ses questionnements portent sur les manières dont les différents acteurs du système gèrent (aux échelles macro, méso et micro) les relations complexes entre les injonctions politiques, réglementaires ou d’autres natures et les situations effectives rencontrées dans l’activité en contexte. Il a participé à l’encadrement, ou encadre actuellement, sept thèses et habilitations à diriger les recherches. Parallèlement, il conduit des travaux de recherche en didactique des mathématiques, domaine dans lequel il a dirigé ou dirige actuellement plusieurs thèses.
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